Pourquoi le logement devient-il une urgence en cas de cancer ?

Un cancer bouleverse tous les repères, y compris ceux liés au domicile. Plusieurs situations peuvent justifier une demande pressante :

  • Logement inaccessible (absence d’ascenseur, pas d’adaptation possible pour fauteuil ou appareillage médical).
  • Habitat insalubre présentant des risques supplémentaires liés à la santé fragile des malades.
  • Difficultés financières avec perte de revenus suite à l’arrêt maladie, rendant impossible le paiement du loyer actuel.
  • Éloignement des soins : le domicile est trop loin d’un centre d’oncologie, engendrant surcoût et fatigue.
  • Rupture familiale (séparation, violence, isolement), rendant le maintien au domicile intenable.

D’après l’ARS Île-de-France, 17 à 21 % des malades du cancer rencontrent à un moment du parcours des difficultés majeures liées à leur logement (ARS Île-de-France). L’enjeu n’est jamais qu’administratif : disposer d’un logement adapté, stable, proche des réseaux de soins et d’entraide, c’est participer concrètement au combat contre la maladie.

Existe-t-il une procédure d’urgence pour obtenir un logement social quand on a un cancer ?

Oui, et elle s’appuie principalement sur deux dispositifs :

  • La procédure DALO (Droit Au Logement Opposable) en urgence.
  • La reconnaissance d’une situation de priorité médicale par les bailleurs sociaux.

DALO : De quoi s’agit-il et qui y a droit ?

Le DALO est un droit fondamental qui permet, lorsqu’aucune solution de logement n’a été trouvée après une demande classique, de saisir une commission pour statuer sur le caractère urgent de la situation. Les critères incluent notamment :

  • L’absence de logement ou le risque imminent de perte d’habitation.
  • La menace sur la santé, dûment documentée par un médecin et des travailleurs sociaux.

Le cancer entre pleinement dans ces critères, surtout en cas de :

  • Traitements lourds nécessitant un domicile accessible ou adapté (immunodépression, mobilité réduite…).
  • Environnement dangereux pour la santé (plomb, humidité, précarité énergétique).

Quand et comment saisir la commission DALO ?

  1. Constituer un dossier DALO : Il faut déposer le formulaire Cerfa n°15036*01 (« demande de logement DALO ») disponible en mairie, auprès d’une assistante sociale hospitalière ou sur service-public.fr.
  2. Documents justificatifs essentiels :
    • Preuve du diagnostic, attestations médicales argumentant la nécessité d’un aménagement ou d’un déménagement.
    • Courriers de professionnels de santé (oncologue, médecin traitant, assistante sociale hospitalière…)
    • Justificatifs de ressources, de situation familiale (jugement, attestation de séparation), loyers, etc.
  3. Déposer le dossier auprès de la préfecture ou de la commission DALO départementale (en Île-de-France, chaque département possède sa commission). Le délai de traitement varie de 2 à 6 mois mais un courrier motivé peut accélérer la procédure en cas d’urgence vitale.

Chiffre-clé : En 2022, dans les départements franciliens, plus de 15 000 dossiers DALO ont été déposés. Un tiers concernait des motifs de santé selon les données annuelles du DRIHL Île-de-France.

Comment être reconnu comme cas prioritaire pour un bailleur social ?

En dehors du DALO, chaque bailleur social (OPH, ESH, etc) dispose aussi de « quotas médicaux » ou d’une réserve pour situations sociales lourdes, parfois à l’initiative de la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées).

L’attribution prioritaire repose sur :

  • Un courrier du médecin traitant ou hospitalier expliquant le contexte (incompatibilité du logement actuel avec la maladie, nécessité d’un appartement rez-de-chaussée, accessibilité…).
  • Un avis circonstancié d’une assistante sociale hospitalière. C’est souvent ce document qui fait la différence, car il « contextualise » la demande.
  • Le soutien d’une association référente (ex : Ligue contre le cancer, Ensemble face au cancer, structures du Réseau Parcours Cancer), qui accompagne parfois jusqu’aux commissions d’attribution.
  • Une inscription dans le SIAO (Service Intégré d’Accueil et d’Orientation), surtout si « urgence vitale » (hébergement en hôtel médicalisé temporaire).

Astuce : Certains bailleurs franciliens demandent aussi une orientation préalable via la MDPH afin d’adapter l’appartement (barres d’appui, douche à l’italienne, etc.). Toutes les demandes doivent systématiquement être renouvelées si la situation évolue ou devient critique.

Qui peut accompagner et accélérer une demande de logement social en urgence ?

Le système de logement social francilien implique de nombreux professionnels et réseaux, dont les interventions, coordonnées, accélèrent l’accès prioritaire. Voici les principaux relais :

  • Assistantes sociales hospitalières : présentes dans tous les grands établissements franciliens (AP-HP notamment), elles sont formées à la constitution des dossiers d’urgence, à la rédaction des argumentaires et à la prise de contact directe avec les bailleurs. Le recours à leur expertise double la probabilité d’un passage en commission prioritaire (AP-HP, rapport 2023).
  • Associations de patients : telles que la Ligue contre le Cancer, qui disposent d’antennes locales et peuvent intervenir pour plaider une urgence ou accompagner la famille.
  • Le service social de la mairie (CCAS : Centre Communal d’Action Sociale) : propose parfois un appui immédiat, même pour un logement relais en attendant une attribution classique.
  • Plateformes téléphoniques SIAO (au 115), pour une solution temporaire ou en relais hôtelier adapté lorsque la situation ne permet pas l’attente d’un logement classique.
  • MDPH pour toute demande d’adaptation ou de logement pour « personne à mobilité réduite ».

Réseaux de coordination spécifiques en Île-de-France

  • Réseau Parcours Cancer Île-de-France : plateforme d’orientation, relais avec des bailleurs et conseils individualisés.
  • Ligue Contre le Cancer Paris / Île-de-France : accompagnement social et juridique, modalités d’accélération des dossiers difficiles.
  • Fédération Habitat et Humanisme Paris-IDF : expertise sur logements passerelles et dispositifs sociaux innovants pour ménages en soins longs.

Chiffre repère : En 2021, la région Île-de-France comptait 1,24 million de logements sociaux (source INSEE), dont environ 8 % sont attribués chaque année à des ménages prioritaires pour raisons de santé ou d’accessibilité.

Quelles sont les astuces et ressources à connaître pour accélérer une demande ?

Il n’existe à ce jour aucun « guichet unique » qui garantisse une réponse immédiate. Mais certaines démarches permettent de gagner un temps précieux :

  1. Réaliser une double, voire triple démarche (DALO + bailleur local + mairie). Cela évite bien des blocages techniques entre services.
  2. Rencontrer le référent social ou le médecin conseil de la CPAM, qui peut, selon les situations, rédiger un appui spécifique accélérant la demande.
  3. Participer à une « commission d’attribution externalisée », qui réunit sociaux, juridiques et soignants autour des cas complexes (ex : commission d’urgence Mairie de Paris, 39 75).
  4. Insister sur l’urgence dans chaque correspondance, y compris auprès des parlementaires locaux, souvent sollicités comme relais ultime.
  5. Faire systématiquement actualiser le dossier par les soignants dès évolution du traitement ou aggravation de la situation : tout changement positif ou négatif doit être notifié.

Anecdote utile : Plusieurs familles rapportent que la relance régulière (tous les 10 à 15 jours) auprès du bailleur ou du DALO, avec nouveaux éléments médicaux, a parfois permis d’obtenir la priorité dans des délais de quelques semaines au lieu de plusieurs mois.

Quels délais et quelles attentes réalistes en Île-de-France ?

Les délais d’attente varient fortement, mais dans le cas d’urgence médicale liée à un cancer :

  • Dossier DALO déclaré prioritaire : attribution d’un logement sous 3 à 6 mois en moyenne (source DRIHL 2022), parfois moins pour situations vitales.
  • Bailleurs sociaux sans DALO : 6 à 14 mois pour Paris intra-muros et la petite couronne ; 4 à 12 mois pour la grande couronne (valeurs médianes 2022, Observatoire du logement social IDF).
  • Solutions temporaires (appartement relais, hébergement via la mairie ou association) : de quelques jours à plusieurs semaines.

Il n’est pas rare qu’un passage en SIAO ou un appui associatif permette d’obtenir des solutions de court terme, notamment lors de traitements lourds ou de retour à domicile difficile.

Contacts et ressources pratiques pour les Franciliens concernés

Structure Type de soutien Contact / Lien utile
DRIHL Île-de-France Liste des commissions DALO Lien
Service Social Hospitalier (AP-HP, Hôpitaux locaux) Constitution de dossiers, appui personnalisé Auprès du secrétariat de chaque service
Ligue contre le Cancer IDF Soutien social, appui juridique Lien
SIAO Île-de-France Hébergement temporaire / urgence 115 (disponible 24h/24)
CCAS / Mairies Soutien urgent local Se rendre directement en mairie d’arrondissement / commune
MDPH Orientation, adaptation de logement www.mdph.fr (par département)

Perspectives et évolutions attendues dans l’accès au logement social pour raison médicale

Le besoin d’un logement adapté lors d’une maladie grave comme le cancer est une réalité de plus en plus reconnue par les divers acteurs : bailleurs, structures de soins, élus, associations. Si les dispositifs d’urgence ont progressé (création de « quota santé », commissions mixtes, accélération DALO), leur mise en œuvre reste dépendante de l’engagement concret des professionnels et du maillage associatif local. La coordination et la veille active sur l’évolution de la situation restent le principal levier pour qu’un droit théorique devienne un relogement effectif.

Pour aller plus loin, n’hésitez pas à solliciter les travailleurs sociaux de vos centres hospitaliers, à vous rapprocher d’associations locales expérimentées et à consulter les ressources régulièrement actualisées sur Un Horizon Contre le Cancer.

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