Pourquoi des solutions spécifiques de logement ?

En Île-de-France, près de 80 000 nouveaux cas de cancers sont dépistés chaque année (Source : Ligue contre le cancer). Les besoins ne se limitent pas à l’accès aux soins : 10 à 15% des patients déclarent avoir des difficultés pour se loger ou loger leurs proches durant les traitements, selon l’observatoire national de la précarité de la Ligue contre le cancer (2022).

  • D’abord, la distance : certains patients vivent loin du centre où ils reçoivent leurs soins, en particulier pour les thérapies longues ou spécialisées (protonthérapie, essais cliniques, centres expertisés).
  • Ensuite, la sécurité : perte de revenus, séparation temporaire, nécessité de s’adapter à une mobilité réduite… autant de situations qui rendent le maintien à domicile complexe.
  • Enfin, l’accompagnement : un proche accompagnant doit pouvoir rester auprès du patient, sans avoir à dormir à l’hôtel ou dans une salle d’attente d’hôpital.

Les différentes formes de logement solidaire autour du cancer

Le logement solidaire peut prendre plusieurs formes adaptées à différents besoins et durées :

  • Maisons d’accueil hospitalières (MAH) et structures d'hébergement temporaire pour patients et familles
  • Appartements de coordination thérapeutique (ACT)
  • Réseaux associatifs proposant des chambres ou appartements relais
  • Initiatives citoyennes et plateformes solidaires
  • Organismes publics ou spécialisés orientés par les hôpitaux

Maisons d’accueil hospitalières (MAH) et foyers d’hébergement : un réseau essentiel

Les maisons d’accueil hospitalières sont reconnues d’utilité publique, avec une tarification accessible. Elles offrent un hébergement temporaire à proximité d’un hôpital, pour le patient, son conjoint ou ses enfants. Selon la Fédération des Maisons d’Accueil Hospitalières (FMAH), il existe 38 structures en France dont 9 en Île-de-France en 2024 (fmah.fr).

  • Accès majoritairement réservé aux patients ambulatoires ou en traitement lourd et à leurs proches.
  • Tarifs entre 20 et 35€ par nuit pour une chambre double (prix moyens constatés en 2023, avec possibilités de prise en charge via la Sécurité sociale ou les mutuelles).
  • Présence de personnel d’accueil, espaces de vie commune, parfois soutien psychologique ou ateliers collectifs.

Exemples franciliens :

  • Maison de Parents de l’Hôpital Gustave Roussy (Villejuif) : accueille jusqu'à 35 familles, en priorité proches de patients hospitalisés ou en traitement ambulatoire.
  • Maison de Parents de l’hôpital Necker-Enfants Malades (Paris 15)
  • Maison des Parents d’Antoine Béclère (Clamart, Hauts-de-Seine)

À savoir : Les demandes d’hébergement sont gérées via l’assistante sociale du service hospitalier ou en contactant directement la structure. Les délais peuvent varier selon l’affluence et la durée des séjours (souvent de quelques jours à plusieurs semaines).

Appartements de coordination thérapeutique (ACT) et hébergement adapté

Les ACT sont destinés principalement aux personnes fragilisées par la maladie, en situation de précarité, nécessitant un accompagnement médico-social global. Certains de ces appartements sont spécifiquement orientés vers l’accueil de personnes atteintes de cancer, notamment après la sortie d’hospitalisation ou pour des cas complexes (besoins de soins, perte d’autonomie transitoire).

  • Les ACT relèvent de structures associatives médico-sociales agréées (ex : Maison de Santé Saint-Michel, Groupe SOS Solidarités).
  • L’orientation se fait via le service hospitalier ou le service social de secteur.
  • L’accompagnement cité est pluridisciplinaire (infirmier, travail social, soutien psychologique, aide à la réinsertion).

D’après le rapport de la HAS (2020), moins de 300 places sont dédiées à l’Île-de-France tous publics confondus, et l’accès reste conditionné à un dossier social.

Les associations qui proposent des logements temporaires ou relais

Certaines associations spécialisées proposent des solutions innovantes ou ciblées pour l’hébergement temporaire des patients atteints de cancer. Elles travaillent en partenariat avec les centres hospitaliers, consentent parfois des tarifs solidaires et, surtout, adaptent leurs dispositifs aux situations d’urgence ou à l’accueil des proches :

  • La Ligue contre le cancer :
    • Propose un service « Chéquier Hébergement » pour aider au financement de nuits d’hôtel ou de logement en maison d’accueil partenaires (200 à 300 € d’aide par séjour en moyenne, source : Ligue, rapport 2023).
    • À Paris et en Seine-Saint-Denis, la Ligue soutient financièrement des places en foyers partenaires.
  • RoseUp Association :
    • Accompagne spécifiquement les femmes touchées par un cancer, et informe sur les dispositifs d’urgence logement ou de relogement ponctuel. La permanence sociale oriente régulièrement vers des hébergements solidaires selon la situation (plus d’informations sur : rose-up.fr).
  • La Fondation des Amis de la Maison de Solenn (Paris 14) :
    • Logements accueillant des jeunes patients majeurs en traitement à l’hôpital Cochin ou ailleurs à Paris, en collaboration avec les services hospitaliers.
  • Solenciel et SoliHA :
    • Initiatives citoyennes et territoriales permettant à des patients ou aidants de trouver un hébergement temporaire chez l’habitant, après sélection et entretien. Peuvent concerner aussi le cancer dans les situations d’urgence.

Plateformes et dispositifs en ligne : hébergement citoyen et solutions ponctuelles

Face à la saturation des structures hospitalières, des plateformes numériques ont émergé, s’inspirant de la solidarité citoyenne. Leur principe : mettre en relation des familles allant se faire soigner avec des particuliers disposés à héberger gratuitement ou pour un tarif modique.

  • « Entraide Cancer » : service d’offres de chambres ou studios solidaires (source : entraidemaladie.fr, référencé par certains hôpitaux parisiens depuis 2018).
  • « Les Hôtesses de l’Hôpital » : à Paris, organise un réseau d’accueil familial près des centres de soins (présent à la Pitié-Salpêtrière par exemple). Sélection par entretien, contrôle de sécurité, accompagnement humain.
  • « Airbnb Open Homes » : Programme international permettant à des hôtes de proposer, pour des situations médicales graves, une solution d’hébergement gracieux. Plusieurs familles franciliennes ont eu recours à ce dispositif (Source : Airbnb.fr, rubrique causes solidaires).

Les limites et points de vigilance

  • Les offres sont limitées et souvent temporaires.
  • La sélection est variable (entretien, justificatif, accord médical, âge du patient).
  • Le soutien peut être précieux, mais l’encadrement reste ajusté : chaque situation nécessite une vérification, notamment pour des questions d’assurance, de sécurité et de proximité avec le centre de soin.

Hébergement via organismes publics et collectivités franciliennes

Plusieurs dispositifs institutionnels permettent l’accès à un logement transitoire pour raison médicale :

  • Assurance Maladie : Soutient le financement de certaines places en maison d’accueil hospitalière ou foyers partenaires (dans la limite des plafonds en vigueur, voir ameli.fr).
  • CPAM de Paris et Île-de-France : Peut attribuer, sous conditions, une aide au logement lorsque le maintien à domicile ou le déplacement quotidien sont impossibles.
  • Centre d’Action Sociale de la Ville de Paris et sections locales du CCAS : Proposent, au cas par cas, un hébergement temporaire pour raisons de santé ou d’exclusion (places contingentées, évaluation obligatoire).

Les commissions sociales hospitalières (associant médecins, assistantes sociales, représentants des patients) jouent un rôle clé dans l’orientation et l’attribution de ces places, en défendant la situation des patients les plus vulnérables.

Conseils pratiques pour l’accès à un logement solidaire

L’accès au logement solidaire demande parfois anticipation, persévérance et accompagnement. Quelques repères pour avancer :

  1. S’adresser en priorité au service social hospitalier : il connaît l’offre en temps réel, assure le montage du dossier et peut accélérer les réponses. En cas de difficulté, ne pas hésiter à signaler les complications sociales, même si elles semblent « extérieures » à la maladie.
  2. Garder tous les justificatifs (convocation, attestations médicales, pièces de domiciliation, avis d’imposition, attestations de ressources ou de précarité).
  3. Solliciter le soutien des associations locales : certaines peuvent débloquer rapidement une aide financière pour couvrir les premiers jours, ou soutenir une démarche d’hébergement en urgence (notamment Ligue contre le cancer, Croix-Rouge, Secours Catholique).
  4. Évaluer la proximité avec le centre de soins : la fatigue inhérente au cancer impose un logement proche, desservi par les transports, et accessible (absence d’étages sans ascenseur, salle de bain adaptée aux soins, possibilité d’accueil pour accompagnant).
  5. Vérifier la durée de l’hébergement : les structures proposent en général des séjours de quelques jours à un mois, renouvelables selon la situation.

Pour aller plus loin : ressources et contacts utiles

  • Fédération des Maisons d’Accueil Hospitalières – Liste mise à jour des MAH, dossiers et coordonnées par département.
  • Ligue contre le cancer, comité Île-de-France – Informations sur le « Chéquier Hébergement », adresses locales, points d’écoute.
  • ameli.fr – Rubrique « aides au séjour » (hébergement, transports, accompagnement social).
  • RoseUp Association – Entretiens spécialisés et réseau de partenaires pour l’hébergement des malades « jeunes et femmes » (Paris, Seine-Saint-Denis).
  • Référents sociaux des centres hospitaliers à contacter dès l’annonce du traitement (notamment à Gustave Roussy, Necker, Cochin, Pitié-Salpêtrière, Institut Curie).

Favoriser l’accès au logement solidaire : le défi collectif

La question du logement solidaire reste un enjeu peu visible, mais déterminant dans le parcours de soins contre le cancer. Si les initiatives progressent, la demande dépasse souvent l’offre, exigeant coordination et innovations. C’est au croisement du secteur associatif, du sanitaire et de la solidarité citoyenne que naissent les réponses les plus adaptées et humaines. Pour chaque situation, il existe des ressources et des relais : ne pas hésiter à s’en saisir avec l’appui des réseaux médico-sociaux et des associations.

En savoir plus à ce sujet :